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L'ERP comme point de rupture : enseignements d'un naufrage numérique

En tant que chef de projet ERP depuis de nombreuses années, j'ai assisté à bien des situations critiques dans des entreprises de toutes tailles. Mais rares sont les cas aussi brutaux, et aussi éclairants, que celui de l'imprimerie suisse Abächerli Media AG. Une défaillance informatique, une perte de données massive, un ERP rendu inutilisable pendant plusieurs semaines… et au bout du compte, une fermeture définitive. Trente emplois supprimés. Une entreprise fondée en 1956 rayée de la carte, non par une faillite économique classique, mais par un effondrement numérique.

Ce genre d'histoire n'est pas anecdotique. Elle mérite que l'on s'y attarde, parce qu'elle met en lumière une vérité que beaucoup préfèrent ignorer : la dépendance des entreprises vis-à-vis de leur ERP n'est pas une simple question technique, c'est une question stratégique, existentielle même.


Je vous partage mon opinion sur les enseignements d'un naufrage numérique, quand l'ERP devient un point de rupture

J'ai souvent entendu, autour d'une table de direction, des dirigeants qualifier leur ERP de « colonne vertébrale » de l'entreprise. Mais bien peu mesurent ce que cela signifie vraiment. Un ERP n'est pas qu'un outil fonctionnel, ce n'est pas qu'un logiciel. C'est l'ossature même de l'information, des décisions et des flux internes. Quand il tombe, c'est toute l'organisation qui vacille. L'expérience d'Abächerli en est une démonstration tragique. Une erreur humaine — une simple manipulation mal encadrée par un prestataire externe — et tout s'écroule. Plus de production. Plus de gestion des commandes. Plus de facturation. Plus rien. Dix semaines de paralysie, et une reconstruction complète qui, faute de moyens et de temps, n'a pas pu sauver l'entreprise.

Je ne peux m'empêcher de me poser une question qui me turlupine depuis que j'ai découvert cette histoire : comment en est-on arrivé là ? Comment une entreprise, qui semblait solide et bien ancrée dans son marché, a-t-elle pu s'effondrer aussi vite, uniquement parce que son ERP est devenu inaccessible ? La réponse ne tient pas qu'à la technique. Elle tient à la façon dont le projet ERP a été pensé, déployé, sécurisé… ou pas.

Il est facile de blâmer le prestataire externe. Mais, en tant que chef de projet ERP, je sais que la vraie responsabilité est toujours plus diffuse. Externaliser la gestion de son infrastructure informatique n'est pas une hérésie en soi, surtout pour une PME. Mais le faire sans garde-fous, sans vérifications régulières, sans tests de restauration, c'est comme confier les clés d'un avion à un pilote que personne n'a formé. Dans un contexte aussi spécifique que celui de l'imprimerie — où les flux sont complexes, interconnectés, et où chaque minute d'arrêt se paie comptant — cela frise l'inconscience.

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Logiciels ERP français (Posté le mardi 19 août 2025): En 2025, les ERP français connaissent une véritable accélération en matière d'innovation. Ces solutions, longtemps perçues comme rigides, se transforment en outils flexibles et intelligents, capables de répondre à des enjeux métier très spécifiques. Je m'appelle Michel Campillo, je suis consultant chef de projet IT et à travers mon blog, je décrypte l'actualité des logiciels ERP.

Et pourtant, je comprends. J'ai moi-même souvent dû faire des choix sous pression : raccourcir les délais, réduire les budgets, faire appel à des ressources externes faute de compétences en interne. Mais chaque fois, une petite voix me rappelait qu'un ERP mal sécurisé, mal piloté, c'est une bombe à retardement. L'affaire Abächerli le confirme, douloureusement.

Ce qui me frappe également, c'est l'ampleur des conséquences financières. Plus de 750 000 francs suisses de pertes, dont une partie seulement couverte par l'assurance. Combien d'entreprises, même bien gérées, peuvent encaisser un tel choc sans plier ? Et surtout, combien ont réellement pris le temps de relire leurs contrats d'assurance, de cyber-risque, de responsabilité vis-à-vis des tiers ?

Ce sont des questions que je pose désormais systématiquement à mes clients. Parce que je sais que, dans un projet ERP, la technique ne suffit pas. Il faut aussi une gouvernance, une couverture juridique, une anticipation des scénarios les plus noirs. Trop souvent, on s'arrête à l'objectif fonctionnel du projet : faire tourner la production, gérer les commandes, automatiser les factures. Mais on oublie que l'ERP est aussi une source de risque majeur, et qu'il doit être protégé comme tel.

Qui est Michel Campillo?

Je le dis souvent, peut-être trop : un projet ERP ne se termine jamais vraiment. Une fois en production, il faut le maintenir, le surveiller, le tester, le mettre à jour. C'est un organisme vivant. Ce que nous montre l'exemple d'Abächerli, c'est qu'il faut aussi le penser comme une infrastructure critique. Avec des plans de continuité, des sauvegardes vérifiées, des procédures de reprise d'activité documentées et testées. Pas une fois. Régulièrement.

Et cela nous renvoie à la responsabilité que nous portons, nous, chefs de projet. Notre métier ne consiste pas uniquement à livrer des modules et des tableaux de bord. Il consiste à protéger nos clients contre les conséquences invisibles de leurs décisions. À les aider à faire les bons arbitrages entre efficacité et sécurité. À poser les bonnes questions, même (surtout) quand elles dérangent. Sommes-nous sûrs de nos sauvegardes ? Avons-nous un plan B ? Que se passe-t-il si ce système tombe ? Si je ne pose pas ces questions, qui le fera ?

Aujourd'hui, je pense à cette imprimerie suisse. À ses trente salariés. À ses clients perdus. Et à ce prestataire qui, sans doute, n'avait pas mesuré l'impact de son geste. Ce genre d'incident pourrait survenir n'importe où, n'importe quand. La seule différence, c'est belle et bien la façon dont on se prépare à y faire face.

Alors oui, je crois plus que jamais en la valeur d'un ERP. Mais je crois surtout en la nécessité de le déployer avec rigueur, avec méthode, avec conscience des risques. Et si je devais résumer l'enseignement principal de cette histoire, ce serait celui-ci : un ERP, c'est comme une centrale électrique. Tant que ça fonctionne, tout va bien. Mais quand ça explose, mieux vaut avoir construit un abri solide.

👉 ( ◍•㉦•◍ ) Michel Campillo consultant expert en solutions de gestion écrit et publie régulièrement depuis 2004 des articles sur son site web professionnel dédié aux outils d'entreprise et aux questions du numérique et des technologies. Comme tout blogueur il écrit aussi sur des sujets divers, voir le blog pour un aperçu des thèmes abordés.

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Pays de Provence, le 10 juillet 2025

Michel Campillo

Michel Campillo Michel Campillo
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